C’est l’explosion printanière de la végétation ! Depuis trois semaines, les jeunes pousses ont surgi de la terre réchauffée par les rayons du soleil et les dernière gelées ne peuvent plus les arrêter. Je suis en admiration devant la vitalité des plantes au printemps qui révèle la puissance de l’énergie enfouie dans le sol naturel. A la sortie de l’hiver, j’ai envie de retrouver ma forme et ces feuillages tendres et pleins de sève m’attirent autant que le retour du soleil pour refaire le plein de vitamines et de minéraux. Une éclaircie et c’est le signal de la balade !
J’attrape mon panier, un couteau de poche et me voilà partie dans ces beaux chemins creux bordés d’arbres en tenue hivernale. Pas de feuille encore aux frênes et aux chènes, mais l’exposition abritée des talus orientés plein sud, la fertilité des terres au pied des arbres me promettent une riche cueillette.
Dans ce chemin ancestral, le talus s’élève doucement jusqu’à 3 mètres de haut de sorte que je peux ramasser sans me baisser les rosettes de mâches sauvages qui poussent dans la mousse : elles sont toutes fraiches et propres, pas un grain de terre n’adhère à leurs fines racines. Elles ne vont pas tarder à fleurir car elles sont au maximum de leur développement. Juste à côté je coupe délicatement au couteau la base des rosettes de miosothis, toutes douces avec leurs poils mous à la surface des feuilles…le contraste des textures va être succulent en association avec la mâche ! Je commence à imaginer la recette que je vais réaliser avec ma verdure… Sur seulement deux mètres carrés, je découvre plusieurs espèces comestibles offertes à ma gourmandise.
Les feuilles originales de plusieurs touffes de lampsane rejoignent le contenu du panier ainsi qu’un mouron des oiseaux aux longues tiges rampantes : celui-ci sera cuit à l’eau à part pour profiter de son goût de petit pois vert en accompagnement de légumes sauvages. Le gaillet blanc est le plus luxuriant de toutes les herbes du talus ; il redresse ses tiges en forme de goupillons d’un vert émeraude dont je pince les tronçons comestibles avec les ongles. Il est une ressource pour de nombreuses recettes crues ou cuites qui permettent de profiter de son foisonnement sans se lasser. Il fait partie des espèces avec lesquelles je n’ai qu’à laisser courir mon imagination en cuisine pour l’introduire dans les plats habituels et inventer de nouvelles saveurs.
Je reprends la marche et rentre davantage sous le couvert des arbres. Une source court au bord du talus et baigne les pieds des épilobes hirsutes et du cresson de cheval que je pourrais ajouter à ma récolte. Par prudence, j’évite de les cueillir malgré la tentation car elles pourraient être contaminées avec des parasites issus d’un élevage proche. Je préfère me contenter des jolies feuilles en coeur de l’alliaire dont le parfum va assaisonner ma recette. Le chemin débouche sur une clairière où fleurit gaiement un tapis de pâquerettes : j’en coupe une dizaine au ras du sol car leur note croquante est incontournable en salade. Une poignée de jeunes feuilles d’oseille complètera le bouquet de saveurs que je concocte et je quitte enfin la prairie. Au retour, je cueille délicatement quelques fleurs de pulmonaires et de coucous pour décorer mon plat et les dépose avec soin dans une boite où elles ne risqueront pas de s’abimer.
Mon panier est rempli au bout d’une demi-heure de balade, et j’ai pu rassembler une diversité de feuillages qui m’assure de réaliser la recette de mon choix. Avec quelques noix et un fromage de chèvre frais de l’ Aveyron, je vais préparer un mesclun de salades sauvages pour le repas de midi. Et vu comme la promenade a ouvert mon appétit, mon abondante cueillette ne sera pas de trop pour remplir les deux assiettes des convives !